jeudi 23 juin 2011

De l'importance du repaire

C'est sûr, on n'est jamais aussi bien qu'à la maison pour écrire. Par écrire, je veux dire rédiger, corriger, suer sang et eau lorsque vient le temps de passer du plan et des recherches à la rédaction en tant que telle.

Mais lorsqu'il s'agit de remue-méninger, examiner ses idées sous tous les angles, coucher des esquisses de personnage ou encore jeter des bouts d'univers sur le papier, la maison n'est peut-être plus la place idéale : à la maison, il y a toujours quelque chose pour nous distraire, depuis la télévision, la musique, le (la) conjoint(e) qui réclame de l'attention, le chat qui réclame de l'attention, la vaisselle à faire (et qui se révèle presque tentante parfois), etc. D'autant que quand on remue-méninge, on n'écrit pas forcément. On peut rester les yeux dans le vague plusieurs minutes avant de noter quoique ce soit, ce qui peut être tout un exploit chez soi.

C'est là qu'intervient le "repaire"...

Le repaire, c'est la place à l'extérieur de la maison où on aime aller pour s'isoler au milieu du monde : ce peut être le café où l'on prend toujours la même table au fond pour étaler ses cahiers/ordi/crayons/ouvrages en toute sérénité tout en buvant une bonne tasse de café/chocolat/thé, et où l'employé vous reconnaît parce que vous venez très souvent et que vous accomplissez toujours le même rituel (et il ne vous dérange jamais, car il sent que vous faites quelque chose "d'important"). Ce peut aussi être un banc de parc à l'ombre. Ou encore un circuit de promenade favori qui vous aide à réfléchir. Ou les deux heures d'attente à la laverie. Ou... ou...

Il y a tant que places qui peuvent devenir notre "repaire". On explore les endroits, et on finit par s'en trouver un qui nous convient à nous personnellement. Ce n'est pas forcément une place romantique, ou spécialement inspirante. Pas besoin de boiseries sur les murs ou d'un décor victorien, non. Le repaire est un lieu où, sans raison particulière, on se sent à notre aise pour rester les yeux dans le vague à réfléchir, la bouche ouverte, l'air concentré et certainement un peu stupide. Un lieu où, chaque fois qu'on y va, on réussit à remplir miraculeusement quelques pages de notre carnet de note d'un tas d'annotations, de liens qu'on n'était pas parvenu à faire avant, d'idées de génie (tout du moins, c'est ce que l'on pense sur le coup ;-)), de bouts de plan (ou de plans complets).

Et si jamais rien ne nous est venu dans ce repaire, on sait qu'on va y passer un peu de bon temps. Virginia Woolf a écrit en 1929 sur le fait d'avoir "Une chambre à soi" (un endroit à soi pour écrire et de l'argent pour être indépendante) pour pouvoir, en tant que femme, être écrivain. Bien sûr, l'époque a changé. Les femmes ont le droit d'aller dans les cafés seules ou dans les parcs pour flâner sans que ce soit suspect. Et le repaire n'est pas l'équivalent de cette "chambre à soi". Je me disais simplement que le "repaire" (qui vaut pour les hommes et les femmes), celui qu'on s'est trouvé, c'est simplement du "temps à soi" : une bulle qui permet de s'extirper du quotidien pour se choyer. Et quand on veut devenir écrivain, se choyer c'est se donner du temps de qualité pour faire fonctionner ses neurones.

Ceci n'est pas un bol de vermisseaux,
mais un bol de feuilles de thé Pu Er ;-)





Moi, j'ai trouvé mon repaire : c'est un endroit calme, lumineux, sympathique et détendu. Et en plus on y boit le meilleur thé de toute la ville.

8 commentaires:

  1. Daniel Sernine23 juin 2011 à 16:34

    Je comprends tout ça, Pascale, mais pourquoi nous montres-tu un bol de vermisseaux pour illustrer ton propos? :O/

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  2. Daniel : ce n'est pas un bol de vermisseaux ;-))) C'est un bol de feuilles de thé Pu' Er...

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  3. Aaaahhh! Quel beau billet! Moi je l'ai trouvé, mon repaire... Un petit café bien confortable, on y boit le meilleur thé latté chaï de la ville... J'y vais tous les mercredis, beau temps, mauvais temps!

    Et c'est vrai que côté inspiration, ça fait vraiment toute la différence... :D

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  4. Tellement vrai tout ça! À l'état du brainstorm, la maison, c'est pas l'idéal. Pour ma part, j'ai deux "repaires" : mes runnings shoes et un bout de bitume quand j'en suis au brainstorming pur où tout est à inventer et mon café habituel pour les moments de prise de note (qui peuvent survenir après la course).

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  5. Pour l'écriture RAW, la prise de notes et le brainstorming, j'aime bien mon salon roulant (voir www.rtcquebec.com). Et pour le brainstorming pur, rien de tel que bercer un enfant au milieu de la nuit.

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  6. Beau billet ! Avant, je n'avais pas vraiment de repaire. Maintenant que nous avons notre maison, j'ai une pièce du sous-sol complètement à moi ! J'y ai même peint des tableaux noirs pour mes brainstorms... Ô, joie !

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  7. Et oui, comme je le disais, chacun a son repaire. Rien que dans les quelques témoignages présents, il y a déjà une belle diversité de repaires ;-)
    Carl : des tableaux noirs ! Je suis jalouse. Oui. J'avoue.
    Frédéric : la méthode du bébé est bonne, mais elle ne dure pas longtemps ;-)
    Gen : j'étais sûre qu'il y aurait de quoi de sportif là-dedans ;-)

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  8. Pour ma part, je dois redécouvrir mon nouveau quartier pour découvrir ledit repaire... et trouver le moment. Je suis heureuse de découvrir que je ne suis pas la salle à qui la vaisselle/ménage fait les yeux doux dans ces moments-là.
    Pour l'instant, la cour me sert de lieu, surtout que le petit alien aime bien être couché sur la table sacrificielle.

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