Voici un passage de La Maison de Claudine de Colette, auteure dont je vous ai parlé il y a peu de temps. La Maison de Claudine est le récit de la jeunesse de Colette : une enfance heureuse à la campagne, entourée de sa mère adorée (Sido), de son père (Le Capitaine) et de ses animaux de compagnie.
Cet extrait m'a été envoyé par ma maman, qui, elle aussi, aime beaucoup Colette (les chiens font-ils des chats ? je ne crois pas... ;-)) :
…Que tout était féerique et simple, parmi cette faune de la maison natale… On vous a conté que l’araignée de Péllisson fut mélomane ? Ce n’est pas moi qui m’en ébahirais. Mais je verserai ma mince contribution au trésor des connaissances humaines, en mentionnant l’araignée que ma mère avait – comme disait papa – dans son plafond, cette même année qui fêta mon seizième printemps. Une belle araignée des jardins, ma foi, le ventre en gousse d’ail barré d’une croix historiée. Elle dormait ou chassait, le jour, sur sa toile tendue, au plafond de la chambre à coucher. La nuit, vers trois heures, au moment ou l’insomnie quotidienne rallumait la lampe, rouvrait le livre au chevet de ma mère, la grosse araignée s’éveillait aussi, prenait ses mesures d’arpenteur et quittait le plafond au bout d’un fil, droit au-dessus de la veilleuse à huile où tiédissait, toute la nuit, un bol de chocolat.
Elle descendait mollement comme une grosse perle, empoignait de ses huit pattes le bord de la tasse, se penchait, la tête la première et buvait jusqu'à satiété. Puis elle remontait, lourde de chocolat crémeux, avec des haltes qu’impose un ventre trop chargé et reprenait sa place au centre de son gréement de soie.
Couverte d’un manteau de voyage, je rêvais, lasse, enchantée, reconquise au milieu de mon royaume.
– Où est ton araignée, maman ?
Les yeux gris de ma mère, agrandis par les lunettes, s’attristèrent : « Tu reviens de Paris pour me demander des nouvelles de l’araignée, ingrate fille ? »
Je baissais le nez…
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